Dans le monde de l’entreprise, plusieurs terminologies sont indûment employées pour évoquer les achats de longue traîne : achats de classe C, achats indirects, achats sauvages… Si chaque terminologie suit une logique précise et désigne un périmètre achat qui lui est propre, ces différents segments d’achats présentent aussi des caractéristiques et des problématiques communes.
Achats indirects, achats de classe C, achats sauvages… Comment les différencier ?
Travailler malin et efficacementLa grande famille des achats de longue traîne
On retrouve les achats dits « de longue traîne » sous différents intitulés selon la culture, mais aussi le secteur d’activité de chaque organisation : achats indirects et hors production, achats de classe C, achats simples et critiques ou encore achats sauvages. Pourtant, chaque terminologie a bien sa propre définition.
Les achats indirects
Par définition, les achats indirects désignent les produits et/ou services dont les entreprises ont besoin pour fonctionner, mais qui n’entrent pas dans leur cœur de métier, c’est-à-dire dans les biens vendus aux clients finaux.
Dans le secteur industriel, les achats indirects sont également appelés « achats hors production ». La plupart du temps, les directions des achats emploient ces termes pour structurer leurs équipes en interne (achats directs et indirects, par exemple, ou bien achats de production et hors production).
Les achats de classe C
L’analyse ABC est une méthode de classification inspirée de la loi de Pareto (aussi appelée loi des 80/20). Cette règle statistique stipule qu’environ 80 % de la valeur globale est produite par 20 % des unités les plus importantes. Appliquée aux achats, cette méthode vise à hiérarchiser les produits et/ou services achetés selon les dépenses engagées par les entreprises et les segments d’achats couverts.
Dans cette configuration, trois catégories d’achats se distinguent :
Les achats de classe A représentent en moyenne 80 % des dépenses en entreprise et 20 % des catégories d’achats ;
Les achats de classe B comptent pour 15 % des dépenses et 30 % des catégories achats ;
Les achats de classe C pèsent pour5 % des dépenses et 50 % des catégories d’achats.
Cette approche souligne l’importance d’ajuster sa stratégie et de prioriser ses plans d’optimisation afin d’obtenir le meilleur rendement.
Les achats simples et critiques
La matrice de Kraljic est aussi une méthode de classification et d’analyse du portefeuille achats bien connue des acheteurs. Elle implique de croiser l’importance stratégique des achats avec la complexité du marché fournisseurs. Cela permet d’identifier quatre grandes catégories d’achats : les achats stratégiques, leviers, simples et critiques.
Dans cette cartographie, deux catégories présentent un impact financier et métier modéré, propre aux achats de longue traîne :
Les achats simples ont un faible niveau de complexité du marché fournisseurs, c’est-à-dire qu’il est facile de s’en procurer ;
Les achats critiques présentent, quant à eux, un fort niveau de complexité du marché fournisseurs, comportant ainsi un certain risque d’approvisionnement.
Cette approche permet d’identifier le poids stratégique des différentes catégories, à la fois sur le plan interne et externe, et d’adapter la stratégie achats.
Les achats sauvages
Aussi appelés « achats spot » ou « achats ad hoc », les achats sauvages représentent tous les achats réalisés en dehors de processus définis par la politique achats. Il peut s’agir d’achats effectués auprès de fournisseurs non référencés, via un canal non approuvé ou encore à un prix non négocié. Ils doivent leur nom à leur gestion totalement déstructurée. Très souvent, ces achats sont réalisés dans l’urgence et échappent au contrôle des directions des achats. Plus de trois quarts des entreprises considèrent d’ailleurs la réduction des achats sauvages comme une priorité1.
Il semble clair que ces différents types d’achats ne couvrent pas exactement le même périmètre. Cependant, ils soulèvent tous des enjeux en matière de compétitivité pour les entreprises.
Des enjeux communs de compétitivité
Parce que ces catégories d’achats sont généralement perçues comme non stratégiques, leur gestion n’est que rarement structurée au sein des entreprises. S’en suivent deux phénomènes bien connus de la communauté achats.
Des processus défaillants
Les directions des achats n’ont pas souvent les ressources requises pour optimiser la gestion de ces catégories d’achats. Par exemple, il n’y a pas toujours de responsable achats indirects. Cela se traduit souvent par des processus peu efficaces. Ainsi, certaines organisations n’ont pas encore mis en place la dématérialisation des transactions, alors même que cela présente de multiples avantages. De fait, la défaillance de ces processus a un impact économique, mais aussi environnemental et social non négligeable.
Sur le long terme, le risque est que ces processus deviennent si complexes, chronophages et obsolètes que cela poussera les clients internes à chercher d’autres alternatives. C’est de cette façon que les achats sauvages se multiplient et deviennent un véritable fléau pour les directions des achats.
La multiplicité des flux
Ces catégories d’achats englobent une grande variété de familles d’achats et de références. Les entreprises se retrouvent souvent avec un portefeuille fournisseurs extrêmement large, ainsi qu’avec un grand nombre de transactions et de livraisons. À titre d’exemple, les achats de classe C ne représentent que 5 % du budget achats, mais ils concentrent près de 60 % du volume de commandes, 75 % du nombre de fournisseurs et 85 % du nombre d’articles au sein des directions des achats.
En l’absence de toute démarche de rationalisation, les conséquences de ces processus défaillants se trouvent alors démultipliées. Ces phénomènes ont un impact significatif sur la performance des directions achats et, de manière plus générale, sur celle des organisations. Cela soulève notamment des enjeux quant à l’efficacité opérationnelle, la maîtrise des coûts totaux d’acquisition (TCO) et la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE).
Qu’est-ce que le coût total d’acquisition ?
Le coût total d’acquisition (Total Cost of Ownership en anglais) désigne le coût global d’un bien ou d’un service tout au long de son cycle de vie. Cette méthode de calcul prend aussi bien en compte le prix d’achat que les coûts connexes, qu’ils soient relatifs à la maintenance, à l’utilisation, à la non-qualité ou encore au retrait du produit, par exemple.
Loin d’être non stratégiques, toutes ces catégories d’achats doivent être considérées comme des sources potentielles de compétitivité. C’est pourquoi il convient d’en optimiser la gestion à travers une méthodologie dédiée, qui vient répondre aux enjeux spécifiques des achats de longue traîne. Finalement, qu’il s’agisse de matières premières, de flotte automobile ou même de mobilier de bureau, c’est bien l’ensemble des catégories d’achats qui méritent d’être mises sous contrôle, sans exception.
1 Basware & The Hackett Group, Perception vs Reality: A Report on Maverick Spend, 2018